Démarche

Le coeur battant du temps présent

Au moins une décennie est passée depuis que je me consacre à la mise en scène. Ce site témoignera de tous les actes théâtraux créés dans les paramètres de ma compagnie Coeur battant et en tant que metteuse en scène invitée. Dans la théâtrographie, il n’y a pour le moment que dix productions présentées mais cette section s’étoffera avec d’anciennes et futures mises en scène. Une décennie est l’occasion de nommer plus précisément ce que je fais et ce qui m’anime. Je mets ici des extraits d’un texte sur ma démarche artistique qui décrit un peu mon geste de mise en scène.

Le théâtre qui affirme, qui impose une façon de penser, le théâtre des réponses me rebutent. Dans mes premières mises en scène, je voulais « tout simplement »:

  • Proposer aux spectateurs une expérience où ils seraient libres de se positionner.
  • Célébrer le médium du théâtre et ses outils artisanaux.
  • Mettre les acteurs au centre pour faire vivre la catharsis aux spectateurs.
  • Donner le goût aux spectateurs de créer à leur tour. Petit programme…

Si tous ces voeux sont toujours là dans ma pratique, d’autres objectifs sont venus étoffer le dialogue avec le public.

La pertinence d’une proposition:

  • Qu’est-ce que je veux raconter à partir de la fiction que l’auteur propose ?
  • Pourquoi la présenter aux spectateurs québécois aujourd’hui ?
  • À qui je m’adresse particulièrement ?

La nature de cette proposition:

  • Est-ce qu’elle dépeint une des grandes questions qui fondent l’humanité ?
  • Ou est-ce le portrait intime d’un être humain en particulier ?
  • Est-ce que c’est une oeuvre qui approfondit l’étude des actions humaines ?
  • Propose-t-elle un débat qui agite actuellement notre société ?

La forme:

  • Quelle part repose sur le jeu des acteurs, l’espace, le son, les éclairages, les costumes, la vidéo ?
  • Comment peuvent-ils être mis à profit pour faire naître l’univers rêvé ?
  • Pour dégager un autre angle du texte, comment peut-on utiliser ces outils pour déjouer une forme attendue, contribuer à la relecture d’une œuvre classique ?
  • Et dans le cas d’une écriture contemporaine ?

Mais ce n’est que tout dernièrement que j’ai pu formuler la grande question qui, peut-être, englobe toutes ces questions: Comment faire battre le coeur du temps présent ? Le temps présent est la grande force des arts vivants et qui fera que cet art vivra éternellement. Le temps présent, la présence réelle des acteurs, la réception des spectateurs en temps réel. Comment tout orchestrer pour que tout ce qui a été imaginé, rêvé, répété, essayé, trouvé en amont sur ma table de travail, aux réunions avec les concepteurs et dans la salle de répétition avec les interprètes, comment tout ça pourra prendre vie à chaque représentation dans une salle où le temps présent est incontournable ?

Célébrer le mouvement intérieur, le doute. Déjouer l’immobilisme, le figé.

Traduction des mondes imaginaires

Un fil rouge se dessine depuis Le grand cahier. Ce fil ne se retrouve pas au niveau formel ni dans dans la thématique des textes montés. Les redondances se retrouvent plutôt dans le positionnement et parfois même dans le refus d’un personnage de la pièce face à sa condition humaine.

Pour ces personnages, l’affranchissement ou le retrait du réel se fait par la fiction, sous toutes ses formes. Ils imaginent une autre façon de vivre, que ce soit par survie, par idéologie ou par pathologie. Par le truchement de leurs actions, pour le meilleur ou pour le pire, ces personnages nous pointent nos conventions et nos structures sociales qui nous semblent immuables et indiscutables entraînant dans leur sillage la morale et l’éthique de notre époque. Ces personnages sont importants car ils nous empêchent d’arrêter de penser et nous forcent à remettre en question ou à confirmer à nouveau ce qui régit notre société.

Ces personnages font partie des mondes imaginés par un auteur et l’action principale de ma démarche artistique est de les révéler scéniquement, créer une carte visible de tous ces continents imaginaires. Après le choix des textes, je vois donc la suite de mon travail comme la traduction de ces univers. Pour que l’expérience soit claire pour les spectateurs et que la rencontre ait lieu. Chaque univers est unique et je tente avec toute l’équipe d’un projet de dégager les composantes esthétiques propres à chaque pièce. C’est donc avec nécessité que je revendique mon éclectisme des formes et des répertoires dramaturgiques. Pour témoigner de l’unicité de l’imaginaire et le point de vue singulier sur les actions humaines, proposés par les auteurs, toutes époques confondues.

Ma démarche est peut-être ce fantasme de réussir à traduire le monde intérieur d’une personne et à le faire entendre à une autre qui l’écoute et cherche à comprendre.

Catherine Vidal

Prix

  • Première lauréate du Prix Jovette-Marchessault —  édition 2020

  • Bourse Jean-Pierre Ronfard — Résidence de mise en scène au TNM, 2016-2018

  • Prix de la critique AQCT, saison 2012-2013, catégorie Mise en scène pour DES COUTEAUX DANS LES POULES.

  • Prix Cochons d’Or 2009, meilleure production théâtrale pour LE GRAND CAHIER

  • Prix Direction de cochons 2009, meilleure mise en scène pour LE GRAND CAHIER

  • Nomination pour les Masques 2002, rôle de soutien pour Madeleine dans LES PARAPLUIES DE CHERBOURG

Catherine V. – CV
Catherine V. – Théâtrographie